L’immigration est-elle une bonne solution à la pénurie de travailleurs?

Léa Massé
Le machiniste Hssin Ghnem, originaire de Tunisie, a été le premier de trois à immigrer pour travailler dans l’usine Précicast de La Baie il y a deux ans.

Léa Massé

Avec la pénurie de main d’œuvre qui bat son plein au Saguenay-Lac-Saint-Jean, l’immigration devient une solution de plus en plus utilisée par les employeurs. Sur papier, cette initiative sauve les entreprises, toutefois en pratique, des divergences culturelles créent des embûches.

La conseillère et coordonnatrice du centre d’emplois de l’Union des producteurs agricoles (UPA) de la région, Marie Mazerolle, considère l’immigration comme une bouée de sauvetage pour la production d’ici. Cette initiative donne une main-d’œuvre devenue indispensable selon la conseillère. « On a bien vu l’importance des salariés étrangers avec la pandémie. Le gouvernement n’avait pas eu le choix de leur ouvrir exceptionnellement nos frontières », explique Marie Mazerolle.

« Les fermes québécoises n’auraient tout simplement pas pu survivre la saison avec presque 30 000 travailleurs en moins », ajoute-t-elle. Le problème initial, considère Mme Mazerolle, est que trouver un Québécois pour un emploi physique aux conditions atypiques est devenu presque miraculeux.

Pour la contrôleuse financière de l’usine de transformation d’aluminium Précicast de La Baie, Corinne Harvey, il y a d’importantes nuances à ajouter. Celle-ci, chargée récemment du processus d’intégration de trois travailleurs tunisiens, affirme que s’adapter à une nouvelle culture peut amener des difficultés en milieu de travail. Un exemple évident pour elle est le lent apprentissage du français puisqu’une bonne communication est essentielle dès le début pour assurer la sécurité du personnel de l’usine.

Un autre récent choc culturel de la responsable se trouve en certaines pratiques musulmanes. « Présentement, c’est le ramadan. Cela implique que les gestionnaires ont dû s’adapter au manque d’énergie des travailleurs étrangers, qui ne peuvent presque pas manger, pour créer des horaires sur mesure. »

La lenteur du processus fait toutefois l’unanimité chez les deux responsables. Peu importe le type d’immigration, il n’y a rien avant six mois. « Les délais d’arrivée d’un travailleur se sont déjà étirés jusqu’à deux ans! C’est loin d’être pratique quand on a un poste à combler », exprime Mme Harvey. Malgré tout, selon Statistique Canada, les immigrants représentaient les quatre cinquièmes de la croissance de la population active de 2016 à 2021, des proportions censées augmenter aux prochains recensements.